Certains me demandent, d’un air étonné : « Tu habites Istanbul depuis trois décennies et tu vas encore visiter la ville avec un guide ? » Eh bien oui, car les richesses de la cité sur le plan historique, culturel et humain sont telles que, même en ayant effectué la même promenade plusieurs fois, on ne cesse d’y rencontrer des surprises. Ne s’agit-il pas aussi, tout simplement, de découvrir ce qui avait échappé à notre regard la fois précédente ? C’est pourquoi j’ai participé au groupe de visite d’Istanbul Accueil, sous la conduite du guide Mustafa Kemal Dönmez, qui nous a fait partager son érudition, pour redécouvrir des quartiers hors des sentiers battus, que j’avais déjà visités il y a une dizaine d’années, comme Yenikapi, Langa, Kumkapi et Kadirga.
Et qu’y ai-je constaté ? L’incroyable changement de ces zones de la ville !
Le quartier de Yenikapi se trouve à l’emplacement de ce qui fut chez les Byzantins, un des trois ports de la ville, celui de Théodose, abandonné suite aux alluvions le comblant peu à peu. C’est là que furent découverts, enfouis dans la vase, les trente-six bateaux aujourd’hui exposés au Musée archéologique d’Istanbul, qui furent à l’origine d’un contretemps dans la construction du tunnel du Marmaray, tant la découverte archéologique était exceptionnelle.
Le quartier de Langa était jadis habités par des Arméniens, plutôt d’origine modeste, les plus fortunés résidant à Sisli ou Pangalti. Il subsiste de ce passé des maisons à encorbellement délabrées mais dont certaines ont été restaurées, et de belles églises, désormais peu fréquentées mais entretenues avec soin par les cinquante mille Arméniens d’Istanbul.
Quant à Kumkapi, autrefois nommé la « Petite Arménie », zone connue pour ses fameux restaurants de poisson et ses tavernes grecques, il héberge aujourd’hui des Arméniens originaires de Sason, cohabitant avec des Kurdes venus de l’Est de la Turquie.
La caractéristique de ces trois quartiers aujourd’hui ? Leur cosmopolitisme. On est bien loin de l’Istanbul d’autrefois chanté par les voyageurs en Orient ou même de celui des années 1985.1990, que j’ai connu à mon arrivée en Turquie ; les nationalités se sont multipliées, avec des Arméniens d’Arménie venus chercher du travail en Turquie, des Africains, des Ethiopiens, des Russes pauvres arrivés après la chute de l’URSS et de nombreux Ouzbek tenant magasins et restaurants.
La devanture bien appétissante d'un restaurant ouzbek et du très esthétique pain ouzbek vendu par des femmes dans la rue
Une promenade passionnante ? Certes, dans un autre Istanbul, dont certains Stambouliotes ne soupçonnent même pas l’existence…
Mes livres sur Istanbul, vidéo d'une minute :
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