Victor Hugo était déjà très célèbre pour ses poèmes et ses pièces de théâtre quand à la trentaine, il fait connaissance avec une
actrice, Juliette Drouet, qui joue dans sa pièce Lucrèce Borgia.
De cette première rencontre, marquée par un coup de foudre réciproque, va naître une liaison amoureuse
qui durera 50 ans ! C’est pour elle que Victor Hugo, composera, sa vie durant, ses plus poignants poèmes d’amour.
Mon âme à ton cœur s’est donnée, lui écrit-il.
- Je fais tout ce que je peux pour que mon amour ne te dérange
pas.
Je te regarde à la dérobée. Je te souris quand tu ne me vois
pas, lui répond-elle.
Car toute son existence, Juliette va désormais la passer dans l’ombre de Victor Hugo. En effet, ce
dernier, marié, continuera toujours à vivre avec son épouse et ses cinq enfants. Aussi Juliette habitera-elle tout le temps, au fil de nombreux déménagements, dans une rue proche de celle de son
amant. Par amour pour lui, à sa demande, elle renonce au théâtre. Elle accepte de ne plus porter de tenues trop voyantes et de ne plus sortir de chez elle, sauf en sa compagnie. A quoi
occupe-t-elle ses journées lorsqu’elle ne voit pas Victor ? Elle recopie les manuscrits du grand écrivain ! Elle sera toujours sa première lectrice et sa conseillère littéraire. Et elle
lui écrit des lettres d’amour. Plusieurs par jour. Elle lui en adressera en tout 20000 !
Juliette Drouet endure tout. En particulier les multiples infidélités de son amant. Car les femmes, qui
tombent amoureuses de Hugo rien qu’en lisant ses poèmes, ne cessent d’occuper la vie du poète. Il a même fait aménager au domicile conjugal une porte secrète pour y recevoir ses maîtresses.
Plusieurs fois, Juliette le quittera. Mais Victor ira à chaque fois la rechercher en lui répétant une promesse solennelle : Nos deux vies se sont soudées à
jamais.
En 1851, lorsque Napoléon III prend le pouvoir, la vie de Victor Hugo, républicain et farouche opposant
politique de l’empereur, est en danger. Toutes les forces de la police impériale sont à sa poursuite. Juliette le cache, lui procure un faux passeport et lui permet de passer la frontière. C’est
elle aussi qui sauve la fameuse « malle aux manuscrits » contenant toutes les œuvres de Hugo. Et ce dernier prend, avec sa famille, la route d’un exil qui durera dix-neuf ans, sur l’île
anglo-normande de Jersey puis de Guernesey.
Bien sûr, Juliette le suit dans ce petit morceau de terre perdu dans l’Atlantique et s’installe de
nouveau dans une rue à coté de la sienne.
Elle ne quittera Guernesey que lorsque, après la chute du Second Empire, son célèbre amant rentrera
enfin en France.
Toute leur vie, Victor Hugo et Juliette ont tenu un cahier rouge appelé « Le livre de
l’anniversaire » où ils ont chaque année écrit un texte célébrant l’anniversaire de « la nuit bénie », c'est-à-dire leur première nuit d’amour, le 16 février 1833. Ce jour-là,
Victor Hugo avait noté :
Le 26 février 1802, je suis né à la vie, le 16 février 1833, je suis né au bonheur dans tes
bras. La première date, ce n'est que la vie, la seconde c'est l'amour. Aimer, c'est plus que vivre...
Et le 16 février 1883, il écrit : Cinquante ans
d’amour, c’est le plus beau des mariages.
Juliette mourra cette année-là, deux ans avant Victor.
Sur sa tombe, il fera graver l’épitaphe suivante :
Quand je ne serai plus qu’une cendre glacée,
Quand mes yeux fatigués seront fermés au jour,
Dis-toi, si dans ton cœur ma mémoire est fixée :
Le monde a sa pensée, moi, j’avais son amour !
PS : La plupart des photographies sont extraites de deux beaux livres en vente à la Maison de Hugo,
Place des Vosges :
Victor Hugo, photographies de l’exil, sous la direction de Françoise Heilbrun
et Danielle Molinari, Paris Musées.
Juliette Drouet, Mon âme à ton cœur s’est donnée, Maison de Victor Hugo,
Paris Musées.